PIETRA

La carrière s’ouvre à nous comme un espace qui se creuse, s’excave, se vide. Il y est question de vie et
de mort, car elle contient les possibilités du futur de la pierre, (architectures, sculptures…) autant que
les traces du passé (fossiles, incrustations, strates géologiques…). La pierre porte en elle la construction
du monde et la lente usure qui commence avec le temps.
Elle témoigne, comme le dit Roger Caillois, d’une origine trop lointaine pour qu’on puisse s’en souvenir,
et qui se perd dans la nuit des temps – la nuit des pierres immortelles.
Les carrières me fascinent car elles présentent un paysage façonné par l’homme et néanmoins naturel,
une espèce de cité sauvage, qu’il me semble avoir déjà habité. Lorsque j’arpente une carrière, c’est
comme si je rentrais chez moi - quelque part où je ne suis pas encore allée - mais d’où pourtant je viens...
Comme une exploration, j’ai imaginé prélever des pierre-témoins issues d’une fouille archéologique et
j’ai assemblé des chutes de pierres. J’ai produis des paysages à partir de poussière de marbre rapportée
des carrières. Enfin, j’ai photographié ces roches qui semblent indivisibles mais dont nous percevons les failles.


« L’imagination humaine qui se déploie, une imagination plaçant le minéral au coeur du questionnement
sur le rapport de l’homme à ce qui l’entoure, et qui ne prétend plus transformer les pierres en oeuvre d’art,
mais plutôt écouter ce dont ces pierres témoignent d’immortel et d’immémorial »
Roger Caillois, L’écriture des pierres, 1970


©Cynthia Charpentreau